Ce fil rouge, c’était de la folie. Voir, de l’idiotie. Alors que la femme observait sa supposée âme-sœur, avec qui elle ne voyait aucun point commun possible, elle se demandait bien quel intérêt y avait-il a recommencer une vie si c’est pour détester encore plus celle-ci. Et cela ne faisait que quelques heures qu’ils avaient emménagé dans cette maison. Un an à tenir, un an pour savoir ce qu’il se tramait dans cette île. Hors de question de rester sans réponses.
Ils pouvaient faire plus ample connaissance, dialoguer comme des gens civilisés, mais en réalité… Peu importait. Elle allait continuer de le fixer d’un air dédaigneux, assise à table, une tasse de café froid à la main. Non… Nikita ne pourrait pas rester dans cette maison. Si cet homme prenait cette historie d’âme sœur au sérieux : dommage pour lui, elle n’avait aucune envie de faire des efforts pour que cette relation dépasse le stade « inconnus forcés à vivre sous le même toit. ». Par contre, elle n’aurait aucun mal à lui dire de se taire quand elle estimait qu’il dépassait les limites de ce qu’elle pouvait supporter.
Rencontre avec un ermite excentrique. Shéo WabbajackLe premier jour se passa ainsi, tout d'abord la jeune femme fût accompagnée au palier de la porte de Shéo Wabbajack. Ses affaires lui seraient livrées plus tard. Elle ne s'attendait certainement pas à ce qu'elle allait ensuite découvrir.
Et pour cause, l'homme était là, assis sur une souche d'arbre fixant silencieusement ses volailles qu'il accompagnait en promenade tout en fumant sa pipe. En effet, Shéo semble vouer un amour assez étrange pour les volailles. Il a fait installer une pièce spéciale dans ses appartements pour ces dernières et les faisaient sortir quand il en avait l'humeur. Ça, des humeurs, il en a, oui. Son étrange bâton était posé à terre à ses pieds et tandis que la fumée s'échappait son visage se dévoilait. Il semblait plutôt âgé avec sa barbe et ses cheveux blancs. C'est alors que leur regards se croisaient pour la première fois. Ses yeux verrons ne reflétaient d'abord pas grand chose puis il les fit cligner d'étonnement et se mis à tousser. Il n'aurait alors pas su l'expliquer, mais quelque chose venait de se passer. Fasciné et curieux, il se leva, empoignât son bâton comme une canne et alors qu'il s'apprêtait à s'avancer pour accueillir sa visiteuse, il marcha sur la queue d'un chat qui semblait avant ça tout prêt à bondir pour attraper une poule (c'est en tout cas ainsi que Shéo l'avait interprété). Un miaulement de douleur s'en suivit et le félin couru dans l'habitation. (Sans doute s'est il dit alors que le destin avait rattrapé son instinct et que ses croquettes seraient un met plus facile à savourer).
L'excentrique personnage cria alors d'un ton autoritaire à son matou :
-ça t'apprendra à vouloir attaquer mes volailles, créature satanique !
Sans doute espérait-il impressionner sa visiteuse qui était alors restée silencieuse face à cette scène qui devait lui sembler en réalité particulièrement absurde …
-Vous avez vu ça ? C'est comme ça qu'il faut parler aux chats ! Sinon un jour ces créatures nous domineront, c'est certain !
Sur ces mots Nikita resta silencieuse les yeux écarquillés devant l'étrange personnage qui se dressait devant elle. Ainsi réalisa-t-elle sûrement le surréalisme de son accoutrement. C'est ce qui fait réagir les gens dans un premier temps en général. Elle devait se demander si Gandalf s'était échappé des romans de Tolkien. Mais de fait Gandalf n'avait pas de long manteau violet. Ce n'était pas la seule différence mais … certainement la plus flagrante. Shéo préféra simplement déduire que son interlocutrice était muette. Il ne se posa pas plus de questions, ce qui par ailleurs est un fait surprenant pour lui qui avait pour habitude de se poser toute sorte de questions sur tout et n'importe quoi dans les moments les plus improbables. Il continua alors de monologuer :
Un homme comme cela ne devait pas être en liberté, elle en était certaine. Pour avoir côtoyer des criminels, jamais elle n’avait rencontré quelqu’un comme l’homme qui se tenait face à elle. Ainsi qu’une poule et un chat qui fuit à l’intérieur de la maison. Non, elle n’allait vraiment pas pouvoir le supporter. Impossible.
Elle le regarda avec des yeux légèrement écarquillé, puis eut un air presque dégouté. C’était peut-être un test de ceux qui étaient derrière toute cette mascarade. Elle n’allait pas rentrer dans son jeu, n’allait pas tenter de communiquer avec le fou. Et surtout, elle allait trouver un moyen de se débarrasser de lui. Pas non plus l’assassiner (elle préférait payer des gens pour cela : hors de question de se salir les mains) juste… l’éviter autant que possible. Il finira pas abandonner. Elle espérait qu’il abandonnerait.
Il parlait, et parlait. Un monologue sans queue ni tête avec tout de même une invitation à boire un thé. Elle aurait pu se dire que ce n’était pas si dramatique, mais la question sur le loir l’empêcha d’aller au bout de cette pensée. Elle fronça les sourcils.
- Assez.
Ordonna t-elle.
- Si nous devons vivre ensemble, je vous prierais de m’ignorer.
Des mots durs qu’il, elle espérait, comprendrait. N’attendant pas sa réponse, elle fit demi tour et rentra dans la maison.